ESPAGNE 2008-2014
Arrivés le 24 décembre 1998 après 3 mois de marche, nous étions, mes compagnons et moi, les 4 seuls et uniques pèlerins dans la ville de Compostelle la veille de Noël… Ainsi que tous les jours qui suivirent jusqu’au 1er janvier 1999, dernière année sainte du siècle précédant. Une autre époque, la fin d’un âge d’or moderne dans l’histoire de ce vieil itinéraire occidentale.

Entre 2006 et 2010, répondant à différentes commandes, je suis retourné en Espagne pour illustrer magazines et éditions sur le sujet en vogue.

Sans être une démarche d’auteur, plutôt une besogne purement illustrative et commerciale, ce fut l’occasion d’ébaucher une étude visant à cartographier l’atmosphère, l’ambiance, le climat, l’âme d’une époque. Faire l’histoire de la lumière, refaire le long chemin du bâtisseur. Je présentais aussi que cette période paradoxale d’effet de mode artificiel pour le patrimoine et d’amnésie allait nous conduire à une époque d’indifférence totale pour la Pierre et pour l’architecture. Nous y voilà. Le romantisme de ma démarche s’est peu à peu éloigné de ce que “le chemin” devenait. Du moins de ce que mes contemporains en faisait. Depuis les quelques dernières photos à la sauvette réalisées en 2014, cet horizon me semble des antipodes. Tout serait à faire et surtout à refaire sur ce sujet. Mais il ne m’inspire plus rien, sinon une vive critique de la modernité inattentive, distraite et amnésique. Le “Camino” est devenu un symptôme de l’espace formaté sans aventure, sans poésie de l’Europe embourgeoisée. Et que reste-t-il d’un pèlerinage sans aventure ni poésie ?